« Le sommeil n’est pas un lieu sûr. » [NIGHTMARE]

Aujourd'hui, la journée a été rude. Après t'être levé aux aurores pour accompagner la patrouille de l'aube, tu n'avais pas arrêté un instant. Tu étais à peine rentré de cette dernière que tu devais déjà te hâter d'avaler un morceau de viande pour pouvoir repartir le plus rapidement possible pour une leçon de combat express. Rivière Étoilée était un mentor excellent, mais elle ne ménageait pas les efforts et les entraînements, à ton plus grand plaisir. Ainsi, tu allais pouvoir progresser bien vite et atteindre rapidement les objectifs que tu t'étais fixé. Qui sait, peut-être que tu deviendrais plus vite Guerrier que tu ne le pensais ? Après le douloureux cours aux techniques de combats, tu étais parti chasser aux côtés de ta sœur, qui avait ramené davantage de proies que toi. Tu avais mis cela du côté de ton épuisement suite à ton entraînement, mais au fond, tu te savais un bien piètre chasseur à côté des prouesses dont étaient capable Amalgame Nuageux. Tu n'étais tout de même pas revenu bredouille, une bien maigre pie se tenait fermement empoigné entre tes crocs. Enfin, tu pouvais souffler. Enfin, tu allais pouvoir te reposer, prendre un peu de repos. Tu décidas de partager ton repas en compagnie d'Amalgame Nuageux. Tu l'as laissas choisir le morceau à manger et tu la rejoignis dans un coin du Camp, un peu à l'écart des autres. Tu appréciais de partager de tel moment de complicité avec ta sœur. Tu regrettais simplement que Fureur Nuageuse préfère la compagnie de Nuage des Anges à la vôtre. Tu aurais bien aimé partager le gros lapin qu'Amalgame Nuageux traînait en ta direction. Bien que fatigué, tu te relevas pour aller l'aider et une fois arrivé au lieu-dit, tu lâchas prise et t'installas. Tu laissas ta sœur manger la première et lorsque celle-ci t'invitas à prendre part au repas, tu ne te fis pas prier. La saison des Neiges arriverait bien vite et tu ne pouvais te permettre de refuser un si copieux repas. Tes crocs plongèrent dans la chair fraîche de l'animal et arrachèrent des morceaux que tu avalas goulûment.  

À coups de langue, tu débarrassais le museau de ta sœur des petits résidus de chair qui s'y étaient figés lors de son repas. Puis, comme tout bon félin de Clan, tu entamas la toilette de ta sœur. Tu passas ta langue sur son poil à peine sali et en retira toutes les impuretés. Dans les Clans, il était coutume de ce rituel que vous appeliez cérémonie du partage. Après une dure journée comme aujourd'hui, un doux moment comme celui-ci n'était pas de refus. Bientôt, tu irais te coucher. Bientôt, tu pourrais te relaxer, couler des heures tranquilles jusqu'à ce que demain arrive. Tu restas à partager cet agréable moment avec ta sœur durant une bonne partie de la soirée. Puis, lorsqu'un énième bâillement vint ébranler ta mâchoire, tu pris la décision d'aller te coucher, aussi tôt soit-il. Le crépuscule se terminait à peine, la lune commençait seulement son règne que le sommeil te gagnait déjà. Tu donnas un dernier coup de langue sur le front d'Amalgame Nuageux et tu partis en direction de la Tanière des Apprentis, celle qui t'abritait désormais. Tu y entras. Immédiatement, tu fus submergé par la pénombre qui semblait t'attendre. Sans peine, tu trouvas ta litière, en fit deux fois le tour puis t'écroulas sur cette dernière. Vidé de toute énergie, de toute force, tes yeux se fermèrent et tu sombras dans un profond sommeil que tu espérais réparateur.

Le sommeil te gagnes. À peines tes yeux se ferment-ils que tu sombres dans un sommeil profond. Tu fais d'abord face au néant. Le vide absolu. Le noir complet. L'infini. Le tout. Le rien. Aucun sentiment ne prend forme en ce lieu si dénue de sens. Tu ne sais même pas que tu penses. Tu ne sais pas que cet endroit n'est qu'un lieu transitoire, pas encore du moins. Bientôt, une lumière blanche et cinglante t'aveugle. Tu plisses les yeux, tentant vainement de contrôler ce flux géant qui te parvient et te brûle la rétine, t'occultant un instant ton sens visuel. Finalement, la lumière s'atténue. Elle finit même par disparaître au profit d'une ambiance ni trop sombre, ni trop clair. Tu commences à penser que n'auras pas le droit à ton sommeil. Silencieusement, tu pestes alors que le calme revient. Tu t'apaises de nouveau. Ton rythme cardiaque, qui avait accéléré en un rien de temps, diminuait déjà. Le calme revient. Peu à peu, il s'installe, niche ici, devient le maître des lieux. Tu retrouves le calme intérieur. Ta respiration est de nouveau apaisée. Mais pour combien de temps ?

Un vent froid se lève. Tu l'entends s'engouffrer de force dans la tanière. Il est si froid qu'il te fait frissonner à peine entre-t-il en contact avec ton corps. Sans te réveille, tu tentes de gonfler ton pelage pour parer à la morsure du froid, en vain. Elle redouble. Le destin t'en voulait-il réellement ? Alors qu'une nouvelle volée s'abat sur ton pelage, tes yeux s'ouvrent, soulevant tes paupières. Ta fatigue te quitte au profit de ta curiosité. Pensant ouvrir les yeux sur tes camarades endormis et/ou grelottant, tu es surpris de te retrouver seul. La tanière prend des proportions étonnantes alors que tu es seul dedans. Le vent s'engouffre par l'entrée, provocant un sifflement peu réconfortant. Pourquoi n'y a-t-il personne ? Où sont-ils tous passé ? C'est trop calme… Beaucoup trop calme. Et ta sœur ? Amalgame Nuageux ? Elle est où ? L'inquiétude monte en flèche alors que tu fais le constat des disparitions. Les Apprentis… Ton frère… Ta sœur… Alors que tu te lèves pour sortir de la tanière, te rendre compte de ce qu'il se passe, un cri s'élève.

« Nuage Fauve, au secours ! »

Il te glace le sang. Cet appel au secours te met en panique. Tu reconnais sans problème la voix qui semble l'avoir lancé. Affolé, tes yeux deviennent ronds, ton poil hérisse, tes sens se mettent en éveil. Amalgame Nuageux ! Où peut-elle bien-être ? Quel mal la guette ? Peu à peu, tu perds le contrôle. Ton cœur accélère son rythme inlassablement, palpitant à plein régime dans ta poitrine. Ta respiration devient saccadée. Ton corps est secoué de tremblement, de la rage, de l'inquiétude, de la peur. Peu à peu, cette dernière s'initie dans ton corps, dans ta tête, dans ton esprit, dans ton cœur. Tu n'es plus le seul maître à bord. Elle commence à dicter ses lois. Elle a déjà commencé. Elle prend de plus en plus de place, éjectant rapidement la logique et la réflexion. Elle te pousse. Elle te contrôle. Tu ne peux que répondre à son appel. Paniqué, contrôlé, tu sors du camp en trombe, courant à en perdre haleine, cherchant à localiser ta sœur avant qu'il ne soit trop tard.